Depuis un demi-siècle, le portrait démographique de la France a été transfiguré.
En 1975, 5,1 % des Françaises et des Français étaient âgés de 75 ans ou plus. Cette proportion a aujourd’hui plus que doublé, selon les données de l’Institut national d’études démographiques (Ined).
Entre 1975 et 2023*, l’espérance de vie à la naissance est passée de 69 ans à 80,1 ans pour les hommes et de 76,9 ans à 85,8 ans pour les femmes.
L’âge moyen des femmes à la première naissance a été repoussé de 24,1 ans en 1975 à plus de 29 ans en 2022*.
L’indicateur conjoncturel de fécondité s’établissait à 1,9 enfant par femme il y a 50 ans ; il était de 1,6 enfant par femme en 2023*.
Une population plus âgée en moyenne, des enfants moins nombreux et des parentalités plus tardives : de telles transformations ne sont pas sans conséquences pour l’économie, l’emploi et le rapport au travail. Afin de mieux connaître les perceptions des actifs en France sur cette transition démographique, l’Unédic lui consacre la 3e édition de son enquête « Le travail en transitions ». Le cabinet Elabe a sollicité 2000 actifs, à propos de trois facettes de cette mutation de grande ampleur.
- L’arrivée du premier enfant est de plus en plus tardive. Combien d’actifs ont reporté leurs projets d’enfants ? Pour quels motifs ?
- De nombreux Français – un peu plus souvent des Françaises - deviennent proches aidants. Quel est le ressenti des actifs aidants ? Quelles sont leurs attentes vis-à-vis des employeurs ? Comment se situent les actifs qui sont à la fois parents et aidants ?
- Avec l’allongement de la vie professionnelle, la question de la place des seniors en entreprise se pose avec plus d’acuité. Comment les actifs envisagent-ils leur fin de carrière ? Quels sont les rapports entre les générations dans le monde du travail ?
Les résultats présentés ici esquissent des réponses à ces questions.
*données provisoires
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Comment la transition démographique a-t-elle été définie auprès des actifs interrogés ?
La définition suivante de la « transition démographique » a été exposée aux personnes interrogées au tout début du questionnaire : « La transition démographique est le passage d'une population caractérisée par une forte natalité et une forte mortalité à une population caractérisée par une faible natalité et une faible mortalité. Elle s’accompagne d’une baisse du nombre d’enfant par femme/homme, d’un âge du 1er enfant plus tardif et d’une hausse de l’espérance de vie, ce qui entraine un vieillissement global de la population. »
La transition démographique : le grand bouleversement
Pour les actifs, la transition démographique impactera le travail à tous les niveaux (secteurs, métiers, tailles des entreprises) et entrainera des conséquences massives sur le plan macroéconomique (baisse de la population active, de la productivité) et sur la vie professionnelle (carrière plus longue, nouveaux besoins de formation).
Premier enfant de plus en plus tardif : la difficulté de concilier vie professionnelle et vie familiale
Près de 3 actifs sur 10 déclarent avoir déjà retardé ou envisagé de retarder un projet d’enfant, et même jusqu’à 4 sur 10 chez les 18-39 ans.
Cette décision est avant tout motivée par des raisons financières (manque de revenus, de stabilité financière, inflation) et professionnelles (contrat à durée déterminée, chômage). Les actifs – et plus encore ceux qui ont retardé un projet d’enfant – partagent largement le constat qu’avoir un enfant peut nuire à une carrière professionnelle.
Pour concilier travail et parentalité, les actifs attendent des employeurs des aménagements : services de garde et aménagements des horaires ou des congés.
Aidants face à une vie professionnelle entravée : les employeurs ont un rôle à jouer
Aujourd’hui en France, 15% des actifs déclarent être aidants d’un proche âgé de 55 ans et plus, dont 8 % qui sont aidants et parents (la « génération sandwich »). Les actifs aidants sont une population plus féminine et en télétravail, mais pour le reste (catégorie socioprofessionnelle, niveau de diplôme) les aidants ressemblent aux non-aidants ; il n’y a pas de déterminisme sociologique.
La situation d'aidant est perçue ou vécue par tous (aidants comme non-aidants) comme une situation difficile à gérer quand on a une activité professionnelle. Elle est synonyme de trajectoire professionnelle freinée, voire de renoncements qui empêchent d’évoluer professionnellement. 4 actifs aidants sur 10 craignent même de perdre leur emploi.
Loin d’être résignés, les actifs aidants aspirent à conserver leur vie professionnelle voire à l’améliorer. Pour y arriver, ils expriment le besoin d’aménagements, notamment en matière d’horaires, pour faciliter leur quotidien.
Cependant, 55% des aidants salariés déclarent n’avoir bénéficié d'aucun aménagement de leur employeur. Ces aménagements ont pourtant des bienfaits majeurs : les aidants qui ont bénéficié d’aménagements de leur employeur ont une satisfaction quant à leur vie professionnelle et à l’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle nettement meilleure.
Seniors et fins de carrières : des préoccupations et des atouts perçus
Les actifs jugent que l’on est considéré comme « senior » à partir de 57 ans dans la société en général, mais de 52 ans seulement dans une entreprise.
Trois actifs sur 4 déclarent penser « régulièrement ou parfois » à la fin de leur vie professionnelle, et quand ils y pensent, ils ressentent plutôt de l’inquiétude (incertitudes, crainte d’une baisse des revenus ou d’une perte d’emploi).
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Quel accès à l'emploi durable pour les allocataires seniors ?
Lire la publicationDans le prolongement de ses travaux précédents sur les seniors, l'Unédic a publié une étude sur l'accès à l'emploi durable des allocataires seniors. L'objectif est double : d'abord, apporter une meilleure compréhension de la diversité des profils des allocataires seniors ; ensuite, identifier l’âge à partir duquel des difficultés pour accéder à un emploi durable s’amorcent, les allocataires les plus touchés et les pistes explicatives.
Dans le monde du travail, il y a un constat partagé par toutes les générations que les jeunes et anciennes générations n’ont pas la même vision et définition du travail, mais que le dialogue est possible, et surtout qu’ils ont des compétences à partager, à se transmettre. Les seniors sont perçus comme un vivier de talents, un atout pour l’entreprise, des personnes nécessaires à la transmission des compétences et à la stabilité des équipes.
S’engager pour la transition démographique : un levier pour les employeurs
Trois actifs sur 4 déclarent que l’engagement d’une entreprise ou d’une organisation sur ces sujets en lien avec la transition démographique les inciterait à y rester durablement ou à y postuler. Ces scores sont plus élevés encore que ceux constatés dans la première édition de l’enquête « Le travail en transitions » concernant les attentes vis-à-vis des employeurs sur la transition écologique.
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Méthodologie
Cette étude a été réalisée en ligne par le cabinet Elabe, du 13 au 23 décembre 2024, auprès d’un échantillon représentatif de 2023 actifs de France métropolitaine, âgés de 18 ans ou plus. La représentativité est assurée selon la méthode des quotas appliquée aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle, catégorie d’agglomération, région de résidence, secteur d’activité et taille d’entreprise. L’échantillon compte 300 actifs aidants. Par aidant, nous entendons une personne qui vient en aide, de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne d’un proche âgé de 55 ans et plus en perte d’autonomie, du fait de l’âge, de la maladie ou d’un handicap. La lecture des résultats sur cette population de 300 individus est possible avec une marge d’erreur comprise entre 2,5 et 5,7 points de pourcentage.