Analyses

Suivi et effets de la réglementation d’assurance chômage

L’Unédic livre les éléments de suivi des effets des réformes de l’Assurance chômage entrées en vigueur en 2021 et 2023. Les résultats présentés portent sur les données à fin juin 2023, soit un an et demi après la mise en œuvre des règles 2021 et cinq mois après l'entrée en vigueur du décret de 2023.

Unédic

Emilie Daudey, Yann Desplan, Maxime Le Bihan, Marie-Hélène Nguyen, Thomas Vroylandt

23 février 2024

Rappel des réformes entrées en vigueur par décret en 2021 et 2023

Au second semestre 2021, l’intégralité des nouvelles règles d’indemnisation du chômage prévues par le décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 sont entrées en vigueur.

  • Octobre 2021 : Nouvelle formule de calcul de l’allocation chômage. La durée de droit et le montant de l’allocation sont désormais calculés en tenant compte des périodes travaillées et des périodes non travaillées.
  • Décembre 2021 : Modification des conditions d’ouverture de droit. Il faut désormais avoir travaillé 6 mois au cours des 24 derniers mois (contre 4 mois dans les 28 derniers mois avant la réforme) pour un ouvrir un droit à l’indemnisation.
  • Juillet 2021 : Dégressivité des allocations. Les allocataires de moins de 57 ans dont les revenus étaient supérieurs à environ 4800€ par mois avant d’être au chômage, voient leur allocation réduite à partir du 7ème mois d’indemnisation. Cette baisse peut aller jusqu’à 30 %.
  • Septembre 2021 : Bonus-malus. Le taux de cotisation des entreprises à l’Assurance chômage peut désormais varier entre 3 % et 5,5 % en fonction du nombre de séparations donnant lieu à une inscription chômage. Ce dispositif s’applique dans les entreprises (de 11 salariés ou plus) de 7 secteurs d’activité.
  • Février 2023 : Contracyclicité. Le décret n°2023-33 du 26 janvier 2023 indique que lorsque la conjoncture est favorable, la durée d’indemnisation des nouveaux entrants à l’Assurance chômage est réduite de 25 %, avec un plancher à 6 mois d’indemnisation. En cas de dégradation de la conjoncture, un complément de fin de droit peut venir prolonger les droits.

Une baisse importante du nombre d’ouvertures de droit

En 2023, le nombre d’ouvertures de droit a baissé de 14 % par rapport à 2019, soit environ 30 000 ouvertures de moins par mois. Cette baisse du nombre d’entrants est le résultat de la conjoncture favorable et de la montée en charge de la modification des conditions d’ouverture de droit : 6 mois de travail contre 4 mois avant la réforme de 2021. La diminution du nombre d’entrées est particulièrement marquée parmi les personnes en intérim et en fin de CDD qui sont les plus impactées par la mesure.

Une baisse du montant de l’allocation atténuée par l’augmentation des salaires

La modification de la formule de calcul de l’allocation chômage entrée en vigueur en octobre 2021 a conduit à des allocations en moyenne moins élevées. En moyenne, ce montant est inférieur de 16 % au montant moyen des entrants avant 2021. Parmi les nouveaux entrants, un allocataire sur deux est concerné par le nouveau mode de calcul. Cette baisse est toutefois atténuée par la hausse des salaires considérés sur la période d’observation. Deux facteurs expliquent cette tension à la hausse : l’inflation et la réforme de la condition d’ouverture de droit à 6 mois qui a pour effet de limiter l’accès à l’indemnisation des personnes ayant un revenu plus faible.

Des effets contraires des réformes 2021 et 2023 qui stabilisent la durée d’indemnisation

En prenant en compte les périodes non travaillées en plus des périodes travaillées pour déterminer la durée du droit, la réforme de 2021 a aussi pour effet d’allonger la durée de droit. Entre 2019 et 2022, la durée d’indemnisation potentielle moyenne des nouveaux entrants a ainsi augmenté de 3,5 mois (100 jours). La durée minimale de travail fixée à 6 mois requise pour ouvrir des droits depuis décembre 2021 a également eu un effet amplificateur de cette augmentation de la durée puisque les droits ouverts ont également 6 mois au minimum.

En revanche, on constate déjà les premiers effets inverses de la réforme de février 2023 qui réduit la durée d’indemnisation de 25 % en période de conjoncture favorable. La durée moyenne de droit des entrants fin juin 2023 est inférieure de 100 jours par rapport aux entrées antérieures à février 2023. Il est cependant encore trop tôt pour tirer des enseignements en termes de durée effectivement indemnisées, mi-2023 seuls 12 % des allocataires étaient concernés par les règles issues de la réforme de 2023.

Les intérimaires, les personnes en fin de CDD et les jeunes plus impactés par les réformes

Les réformes de l’Assurance chômage entrées en vigueur en 2021 touchent prioritairement les intérimaires, les personnes en fin de CDD et les jeunes. En effet, 9 intérimaires sur 10 et la moitié des jeunes ont été impactés par ces réformes.

La modification du calcul de l’allocation a aussi des effets sur les allocataires qui travaillent en cours de droit. Ils sont plus nombreux à travailler, mais comme ils perçoivent une allocation calculée à partir d’un salaire journalier de référence (SJR) plus bas, ils sont moins souvent indemnisés par l’Assurance chômage.

Une faible proportion d’allocataires soumis à la mesure de dégressivité

La mesure de dégressivité de l’allocation concerne une population réduite d’allocataires, environ 90 000 personnes en 2023, soit environ 3 %. La moitié d’entre eux perçoivent une allocation dégressive (45 000 personnes). Il s’agit majoritairement d’hommes (66 %), diplômés du supérieur (76 %), cadres (74 %), dont le revenu perdu était en moyenne de 7 000 € brut.

Un peu plus d’un tiers des entreprises visées par le dispositif de bonus-malus ont un taux contribution majoré

En 2023, le bonus-malus sur le taux de contribution des employeurs concerne environ 30 000 entreprises de 11 salariés ou plus. Parmi ces entreprises, 25 % sont au plafond du malus (taux de cotisation à 5,5 %) et 12 % ont un taux de contribution compris entre 4,05 % et 5,05 %, ce qui porte le taux d'entreprises en malus à 37 %. A l’inverse, environ deux tiers sont en bonus : 32 % sont au plancher - taux de cotisation à 3 % et 31 % entre 3 % et 4,05 %. Pour rappel, le taux de cotisation normal des entreprises (hors Bonus-malus) est de 4,05 %.